Mes premiers articles ont disparu avec mon ancien blog, autodaféisé par Overblog. J'en regrette certains, comme celui-ci, que je ne puis m'empêcher de vous resservir — surtout parce qu'il n'est pas de moi. Mais il est tellement imprévu...
Sur un forum dédié aux anciennes motos en provenance du Pays
du Soleil levant, sévissent quelques poètes-philosophes.
Gérard est l'un deux. En réponse à l'un de ses écrits un
tantinet mélancolique, je lui suggérais de profiter de la vie sans calcul, car
comme chacun sait la vie est courte.
Mais les lecteurs de Jim Harrison, dont je suis, savent que
si elle courte, elle est aussi très large.
Pas tout à fait convaincu, il m’a répondu le joli poème que
voici, où se côtoient une philosophie de bon aloi et une acuité percutante des
choses de la vie, dans un style à la fois majestueux et rafraîchissant.
Jugez-en plutôt :
Serait-ce un blanc-seing pour revivre un temps passé de
l’insouciance, à base de motos à-peu-presques, de clopes rigolotes, de boissons
désénergisantes, et de parties de plaisirs à coui….. rabattues ?
Mais était-ce heureux ?
A supposer qu’aujourd’hui nous eussions à nouveau 20 ans. En
2052, quels regrets nous nostalgiseraient ?
S’agirait-il d’inaptitude aux « maintenant ».
Hier je m’étais promis qu’aujourd’hui on serait demain et
aujourd’hui est comme hier une promesse sans lendemain.
Aujourd’hui, il me reste probablement moins de demains que
d’hier et j’ai raté mes hier quand ils étaient moins nombreux que mes demains
parce que je n’ai jamais su faire de mes demains des aujourd’hui voire des
maintenant.
Ce sont les demains que j’imagine toujours plus beaux que le
aujourd’hui qui empêchent les maintenant de l’être.
Conclusion : j’ai cassé ma montre. Je ne veux plus l’heure,
il me faut le temps.
Quoiqu’en y réfléchissant, je pourrais aussi être immortel,
si je ne le suis déjà.
La seule infirmation de mon immortalité est la mortalité des
autres. En tout cas de ceux qui sont déjà morts. Les vivants, on ne sait pas.
On ne le saura jamais d’ailleurs s’ils le sont, ou à la fin de l’éternité,
quand ça commence à sembler long.
Donc ainsi, j’aurais toujours plus de lendemains que de
hier. Enfin, il me semble.
Y a-t-il un mathématicien dans la salle ? Parce que ça
me chiffonne quand même de savoir si la veille de l’éternité il me restera
toujours bien plus de lendemains que d’hier. Et si ce sera bien un jeudi.
Enfin, la vraie question que pose cette divagation inutile
est la suivante : me serais-je trompé dans les proportions de mon whisky-coca ?
Revenons donc au plaisir et aux motos.
Il y a une petite trentaine d’années, un plaisir quotidien
avec ma CX500*, en montant la chaussée qui arrive au boulot, consistait à
prendre assez
d’élan et de vitesse pour sauter des deux roues au
passage du pont.
Aujourd’hui, je dépasse tout le monde sur la chaussée,
l’Amigo** m’autorisant l’emprunt de la piste cyclable. Puis, ce n’est pas grave
que la densité de véhicules empêche de circuler, puisqu’ils ont mis un radar
fixe 50 mètres avant le pont, ce qui porterait le plaisir aux alentours de 160
roros. A ce prix-là, ça fait cher le plaisir solitaire.
Vivons, dis-tu. Tu as raison, c’est ce que nous faisons de
mieux, de toute façon.
Mais quand jouirons-nous encore ?
Publié avec l'autorisation de Gérard, dit Salfepa.
* Moto Honda à moteur bicylindre en V des années 70.
**L'Amigo est un cyclomoteur Honda à 4 temps, désormais objet de collection.
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