le blogadoch2

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vendredi 30 mai 2014

Permis ou permission ?


Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais je me suis souvent demandé ce qui, parfois, passait par la tête de ceux qui éditent les lois.

Ainsi, il est interdit de faire éclater des pétards.
Il n'est pas interdit d'en vendre.
Le législateur — comme on dit, lorsqu'on ne sait pas bien qui est responsable de la Loi — ne semble pas se soucier le moins du monde de la contradiction. Si personne ne peut les utiliser, à qui les vendre, alors?
À l’inverse, il est permis de consommer de la drogue, mais interdit d’en détenir ou d’en vendre. Alors, à qui l’acheter ?

Dans un autre domaine, lorsqu’un automobiliste commet des infractions graves, il lui arrive parfois de se faire retirer le permis de conduire.
— Ce bonhomme est un danger public, s’écrie, offusqué, le représentant de la loi. Il a brûlé des feux à répétition, passé plusieurs fois des stops sans ralentir, et régulièrement il a  largement dépassé les vitesses imposées. Il faut l’empêcher de commettre d’autres infractions graves qui mettent la vie d’autrui en danger. Il est préférable de lui retirer son permis de conduire, ainsi, il ne risquera plus de sévir !




Dans l’absolu, le raisonnement se tient. Lorsqu’un médecin fait des bêtises, on peut lui interdire d’exercer, et c’est normal. Mais voilà, si le praticien est éloigné des malades et ne peut plus leur nuire, notre automobiliste par contre, peut, en toute légalité, revenir sur la route au volant d’une petite cylindrée, pour laquelle « on » a décidé que le permis de conduire n’était pas nécessaire.
— Ah, bon ! Les autres usagers de la route seraient-ils maintenant sous la protection d’un Saint Christophe omnipotent ? Ou bien notre « criminel »  serait-il soudainement devenu très sage ?

Avant de poursuivre, voyons ce que veut dire exactement l’expression permis de conduire. Selon Wikipedia :
« Le permis de conduire est un droit administratif de circuler donnant l'autorisation de conduire  sur une route publique un ou plusieurs véhicules tels que voiture, motocyclette, cyclomoteur, camion ou autobus, dans une zone géographique donnée, généralement un pays. La délivrance du permis de conduire peut être soumise selon les cas et les lois locales à un test d'aptitude à la conduite de niveau de difficulté variable ainsi qu'à des exigences d'âge minimal. En cas d'accident, l'absence de permis du conducteur impliqué entraîne l'annulation de l'assurance, et les coûts sont à la charge de l'individu. Des sanctions pénales sont également prévues ».

Donc le permis est bien une permission de conduire. Alors, il semblerait logique que la suppression du permis entraîne l’annulation de la permission qui va avec.
—   Mais non, vous n’avez rien compris, monsieur ! Le délinquant a le droit de conduire sur la voie publique une petite auto de moins de 50 cc de cylindrée. La loi l’y autorise, car la voiture ne dépasse pas le 45.
—   Ah, bon. Mais qui nous dit qu’il ne dépassera pas les limitations à 30 à l’heure, comme celles qui se trouvent souvent devant les écoles ? Un gamin renversé à 45 à l’heure ne risque-t-il plus rien ?

La loi, censée nous protéger, autorise  cependant notre danger public à aller tuer. Dans la légalité. La mort sera moins dure, sans doute, car les chocs auront lieu à une vitesse plus faible.
La famille des tués sera bien consolée de savoir que ce monsieur avait la permission de rouler au volant d’une auto, bien qu’il n’ait pas le droit de conduire.

D’une façon générale, la condamnation qui a amené la suspension du permis de conduire se contredit si elle laisse une personne jugée si dangereuse, à continuer à fréquenter la voie publique. De deux choses l’une :
—    ou bien le conducteur n’est pas dangereux au point de lui interdire  de conduire ;
—   ou bien, il l’est vraiment, et à ce moment, il n’a plus le droit de piloter le moindre engin à moteur, comme on a interdit le stéthoscope au médecin véreux. Car les éléments qui ont motivé la condamnation sont les mêmes qu’auparavant : un chauffard d’une part, et la voie publique d’autre part. Et l’on a vu le résultat de cette rencontre.

Mais peut-être ne faut-il voir ici qu’un excès de zèle du tribunal, légitimé par l’acharnement des pouvoirs publics à vouloir sécuriser à tout prix l’usage de l’automobile, fut-ce par la menace et par l’exemple.
Les avocats spécialisés feraient bien de se pencher sur ce point : le choix, le degré de la sentence semblent bien présenter des failles susceptibles d’être exploitées.

D’une façon générale, on constate que les législateurs de tout poil s’acharnent à tenter d’améliorer la sécurité routière, qui ne fait pourtant plus que (formule détestable, je sais) 3000 morts par an, alors que les accidents domestiques en font 20 000 dans le même temps, sans émouvoir quiconque.
Allez comprendre…

— Mais, me direz-vous,  on ne peut pas comparer ! Les risques domestiques sont immenses! Voyez le nombre de personnes qui trouvent la mort dans leur lit…


samedi 17 mai 2014

Balade en Seven en Cévennes...


— Alors, pas un mec qui s'arrête pour vous aider?
Dans mon dos une portière a claqué et maintenant cette voix de femme, agréable, mais un peu inquiète.
Je suis encore penché en avant, le dos collé à ma moto, en train de tenter de la redresser*, mais la fin du mouvement se déroule mal, car si j'ai bien la poignée droite et le frein serré dans la main gauche, j'ai du mal à trouver une bonne prise pour l'autre main, à cause de la sacoche cavalière qui recouvre le cadre de la moto. 
Je sens bientôt l'engin de 230 kg qui finit de se redresser. La béquille latérale sortie, nous nous faisons face. Elle sourit lorsque je la remercie de son aide et que je lui dis que ces acrobaties ne sont plus de mon âge.
Faites comme moi, dit-elle, prenez une CB 500, c'est plus léger.
J'ai donc à faire à une motarde, ce qui explique son comportement altruiste.
Oui, mais une moto ce n'est pas fait que pour tomber :
Je sais, mais j'aime bien les 4 cylindres, et la Seven Fifty est une merveilleuse moto.

J'avais quitté la grande route pour visiter un hameau voisin, attiré par la petite église. Un bâtiment tout beau, qui venait sans doute de faire toilette, sur une placette claire et ensoleillée comme dans un pays du Sud (le petit hameau de la Cadière**) :




De retour au stop de la grande route, le guidon tourné à droite j'attends pour démarrer. Quand vient mon tour, les automatismes de mes mains se déclenchent pour un acte mille fois répété. Mais je ne devais pas être en première, et l'accélération n'est pas suffisante pour la dose d'embrayage que j'ai délivrée. Tout à la fois, la moto hoquète, cale et se couche (en douceur parce que je la retiens le plus possible). 

Je m'étais retrouvé à cheval au-dessus d'une masse inerte, illégitimement vautrée dans le gravier.

Pas de dégâts, à part quelques griffures. Ma gentille secouriste parle beaucoup, elle est plus émue que moi. Avant de partir vers sa voiture, elle m'inonde d'effluves de Mintos en s'inquiétant pour ma santé.

Je suis à deux pas du Vigan, où j'ai hâte de rejoindre la route qui mène au Col du Minier. Une ancienne course côte dans les années 60. Je n'ai que de bons souvenirs de cette épreuve magnifique de 20 km, qui me laissait essoufflé par le stress, et trempé jusqu'aux os par la transpiration. Mais dans un bonheur incommensurable, après un quart d'heure de glissades au ras des falaises et au bord des précipices, au volant de petits bolides à moteur arrière comme la Dauphine 1093 ou la berlinette Alpine.




La petite route déserte d’autrefois est aujourd’hui élargie et très fréquentée, et les frondaisons masquent les ravins d’antan. J’ai du mal à retrouver mes marques, mais certains virages me sont encore familiers, comme le dénommé « la cravate », interminable, dans lequel je n’avais pas osé passer la 4ème. Dans un déchainement de décibels, l’aiguille du compte-tours avait atteint 8300 tours, mais le 1300 Gordini avait bien résisté à cette maladresse. Un démontage plus tardif avait montré cependant que les soupapes étaient allées embrasser les pistons sur la tête...
Je sais que ce jour-là mon classement ne devait pas être trop mauvais, puisqu'il s’était traduit par un joli chèque glissé dans une coupe argentée…

Plus loin, la route vers les sommets est faite pour déchaîner les enthousiasmes et faire rugir les moteurs. De belles courbes qui invitent à l’abus, sinon à l’intempérance… Tout en restant dans un cadre très proche des vitesses autorisées.
Les prises extrêmes d’angle jouent le même rôle que les glissades en Alpine, et sollicitent nos surrénales pour un débit accru d’adrénaline.
Les reprises en sorties de virage n’ont rien à voir avec celles que nous accordaient parcimonieusement nos voitures d’antan. Ma moto, qui a 18 ans et 81000 km, accélère tout de même comme la meilleure des Porsche, et je ne sais pourquoi, j’ai toujours la manie de vouloir le vérifier… 



Après un salut au monde d'en-bas depuis l'observatoire du Mont Aigoual, je rejoins mes potes partis la veille, qui ne m'attendaient plus. À deux, ils occupent une chambre à 3 couchages (lits superposés).
Sur mon instigation, la jeune femme de l'auberge m'accompagne jusqu'à leur porte et leur demande :
— J'ai un client de dernière minute, accepteriez-vous de partager votre chambre avec lui?
— (Hésitation...)
L'un d'eux avance la tête et m'aperçoit :
— Ah, mais c'est lui!
On s'embrasse comme si on ne s'était plus vus depuis 10 ans, 
— Alors, raconte!
Je raconte que j'avais cru ne pas pouvoir me libérer au dernier moment, mais que tout s'est débloqué.

Ils me disent leurs petits plaisirs de la journée dans l'ombre des gorges et au soleil des crêtes, et pour l'un, les joies que lui procure sa nouvelle BMW 1200S Adventure, un monstre rutilant de technologie parfaitement maîtrisée.

Nous sommes dans l'un de nos spots favoris, l'auberge du Chanet, à Nivoliers, sur le Causse Méjean, loin de tout, dans un joli petit hameau. Le patron nous a accueilli avec une chaleur réservée aux vieux amis, et les repas seront à la hauteur de nos souvenirs, dans la salle-à-manger voûtée. Une toujours excellente adresse.

Nivoliers :



Contrairement aux prévisions, le temps a été parfait, et nous n'avons pas eu droit au feu de cheminée. Par contre une ambiance des plus animées, auberge et gîte complets jusqu'au dernier bas-flanc. Avec, le deuxième soir, deux douzaines de joyeux motards d'Angers, qui partiront en caravane, tard dans la nuit pour leur hôtel à Florac.



Le lendemain, nous allons zig-zaguer jusques aux landes de l'Aubrac. Je sais que nous croisons le chemin de Compostelle, aux abords de Nasbinal, lorsque je vois se détacher sur le ciel menaçant un couple de marcheurs aux grandes jambes, maigres silouhettes silencieuses, comme sorties de nulle part. 
Dans cet espace aride et désert, une photo aurait été fascinante, mais il m'est toujours impossible d'agresser de mon objectif des gens qui ne demandent rien, comme ceux-ci, que je n'avais aucun droit de déranger dans l'intimité de leur effort.

Un peu avant c'est l'image lointaine de deux pêcheurs, figés au bord d'un ruisseau paresseux qui serpente dans la prairie.



Nos errances nous mèneront de petites routes en toutes petites routes, certaines ne pouvant guère laisser passer un camion.
Mais que de beaux paysages!



Sur cette photo, prise de la main gauche, les 3 motos sont présentes...


 En route vers l'Aubrac et son ciel menaçant :



Juste pour faire l'original, je me paie une panne d'essence dans la montée d'un petit col, alors qu'il était décidé de s'arrêter au super-marché du village suivant.
Pas de problème, je passe sur la réserve.
Mais, surprise, le robinet est déjà en position "Réserve". Bien sûr, la moto ne démarre pas, même après avoir été secouée et penchée. Comme je m'étais arrêté un peu avant pour une photo, mes complices, déjà loin, ne peuvent pas être prévenus.

Je décide de faire demi-tour et de descendre en roue-libre au village où nous avons déjeuné. Une factrice dans sa Kangoo jaune m'assure qu'il y a une station-service juste en bas de côte, dans la rue transversale où je n’aurai à pousser la moto que sur une centaine de mètres. Ce qui se vérifie. Je m'attends verser dans le réservoir une quantité d'essence peu habituelle, 22 ou 23 litres. Mais surprise, à 16 litres le réservoir est à ras-bord!
Un mystère que je n'ai pas encore éclairci. Je sais que le robinet d'essence sur cette moto est une vraie usine à gaz. Il est possible que le passage de l’essence ne soit pas assuré si il était en position « Réserve » à l’avance.

Je reprends la route sans découvrir mes lièvres de copains, qui seront rejoints après plusieurs tentatives de contacts téléphoniques.

Pour le reste, je ne puis vous décrire les beautés que nous avait réservées la nature. Si vous voulez les connaître, il faut y aller, la France est si belle lorsqu'elle n'est pas trop habitée.
En ce moment, les fleurs jaillissent en prairies, en massifs et en buissons, et ajoutent à leur parfum les éclats de leur palette. Les falaises et les rochers qui ont vu la préhistoire, vous salueront au passage, les ruisseaux chanteront pour vous les légendes d’antan. En plus de leur convivialité, les aubergistes ajouteront à leur menu les conseils précieux pour les itinéraires à venir…
Et sur les routes blanches de la carte Michelin, vous ne verrez pas plus d’une auto toutes les 10 minutes. Un véritable mais bienvenu anachronisme.

Oui, allez-y ! N'attendez pas votre hiver comme moi...


*Pour les non-pratiquants, je dois préciser qu’une moto se redresse plus facilement si l’on lui tourne le dos et que l’on la pousse vers le haut avec les reins en dépliant les jambes, en utilisant ainsi la force des cuisses.
Cette technique exige cependant que la moto soit freinée, qu'elle ne glisse pas pendant le redressement, et que les deux mains trouvent une excellente prise. De frêles motardes parviennent ainsi à relever des motos de 300 kg.
(Photos D.C.O.)

**M'apercevant de mon erreur, je rectifie : le village s'appelle La Cadière de ..., et non Cabriès !